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Société/Conflit Bénin-Niger: Trois opinions, trois perspectives

Le conflit entre le Bénin et le Niger connaît des rebondissements quotidiens, suscitant des réactions variées. A travers cette compilation, La Dépêche vous propose les analyses de Richard Boni Ouorou qui opte pour des solutions diplomatiques et de renforcement de la confiance, tandis que Charles Migan appelle à la modestie et à l’humilité des dirigeants. Candide Azannaï exprime son indignation morale face à la gestion du conflit. Leurs perspectives, bien que différentes, sont complémentaires et soulignent l’importance d’une approche multiforme et coordonnée, basée sur la discussion et la réconciliation, pour désamorcer les tensions et éviter un conflit dévastateur.

NDLR/ Nous présentons ici les analyses de trois personnalités habituées à opiner sur les questions d’intérêt général: Richard Boni Ouorou, Charles Migan et Candide Azannaï. Leurs perspectives sur le conflit entre le Bénin et le Niger sont différentes mais complémentaires. Ouorou propose des solutions diplomatiques et de renforcement de la confiance, Migan appelle à la modestie et à l’humilité des dirigeants, et Azannaï exprime une indignation morale face à la gestion du conflit. Ensemble, ces analyses soulignent l’importance d’une approche multiforme, coordonnée, basée sur la discussion et la réconciliation pour désamorcer les tensions et éviter un conflit dévastateur pour la région.

Analyse des risques d’escalade, des débats politiques et des solutions stratégiques – Richard Boni Ouorou

Richard Boni Ouorou offre une analyse approfondie de la situation entre le Bénin et le Niger, soulignant les risques de l’escalade du conflit. Il identifie plusieurs facteurs contribuant à la tension croissante, notamment la posture belliqueuse de Patrice Talon et la méfiance du CNSP. L’auteur met en lumière les conséquences économiques et sociales potentiellement désastreuses d’un conflit, telles que la rupture des échanges commerciaux et les tensions ethniques et religieuses.

Points Clés :

  1. Position belliqueuse et méfiance réciproque : L’opposition de Talon aux nouvelles autorités nigériennes et la méfiance du CNSP alimentent un climat de tension susceptible de dégénérer.
  2. Conséquences économiques et sociales : La rupture des relations commerciales pourrait entraîner des pénuries, une hausse des prix et des troubles sociaux.
  3. Polarisation politique : Les débats politiques actuels sont marqués par une polarisation extrême et une rhétorique enflammée, compliquant le dialogue constructif.
  4. Propositions de solutions : Ouorou propose des mesures telles qu’un dialogue diplomatique sincère, la médiation régionale, des mesures de confiance et l’engagement international.

Analyse : Ouorou met l’accent sur l’importance d’un dialogue diplomatique et de mesures de renforcement de la confiance pour désamorcer les tensions. Ses propositions sont pragmatiques et soulignent la nécessité d’une approche multiforme et coordonnée. Cependant, il note que la réputation de Patrice Talon complique cette approche, suggérant que Talon pourrait avoir été isolé par ses pairs en raison de son manque de finesse diplomatique.

La nécessaire humilité du pouvoir – Charles Migan

Charles Migan appelle à la modestie et à l’humilité dans la gestion du conflit entre le Bénin et le Niger. Il critique les démonstrations de force et les égos des dirigeants, suggérant que la situation actuelle nécessite une approche basée sur la discussion et la sagesse.

Points Clés :

  1. Dépôt des égos : Migan insiste sur la nécessité pour les dirigeants de déposer leurs égos et de privilégier la discussion.
  2. Intermédiation crédible : Il recommande à Talon de solliciter des émissaires crédibles pour la médiation.
  3. Prudence et humilité : Migan conseille à Talon de prendre du recul et d’éviter les courtisans flatteurs, soulignant que la véritable sagesse réside dans l’humilité.

Analyse : Migan met l’accent sur la nécessité de la modestie et de l’humilité dans la gestion des conflits. Ses recommandations sont pragmatiques et soulignent l’importance d’une approche basée sur la sagesse millénaire de discussion et de réconciliation. Il critique implicitement l’approche de Talon, suggérant que celui-ci devrait prendre du recul et laisser des médiateurs crédibles gérer le conflit.

Quelle honte ? – Candide Azannaï

Candide Azannaï exprime son indignation face au verdict du procès des trois Nigériens devant la CRIET au Bénin, qualifiant ce verdict de « politiquement honteux, diplomatiquement minable et historiquement déplorable ».

Points Clés :

  1. Critique du verdict : Azannaï critique sévèrement le verdict du procès, le qualifiant de honteux et déplorable.
  2. Soutien au Niger : Il exprime sa solidarité avec le peuple nigérien et critique la gestion du conflit par les autorités béninoises.
  3. Indignation morale et éthique : Azannaï souligne l’absence de valeur morale, éthique et juridique dans le verdict rendu, le qualifiant de diversion apparente.

Analyse : Azannaï adopte une position fortement critique vis-à-vis du verdict du procès, soulignant son indignation morale et éthique. Sa critique est incisive et souligne les conséquences négatives de la gestion actuelle du conflit par les autorités béninoises. Il exprime un soutien sans réserve au peuple nigérien, dénonçant l’injustice perçue du verdict.

Lire l’intégralité de chacune des analyses.

Conflit entre le Bénin et le Niger : Une Analyse des Risques d’Escalade, des Débats Politiques et des Solutions Stratégiques. Par Richard Boni Ouorou – Politologue, président du mouvement libéral 

Le conflit entre le Bénin et le Niger, exacerbé par l’avènement du Conseil National pour la Sauvegarde de la Patrie (CNSP) au Niger, constitue une menace significative pour la stabilité de l’Afrique de l’Ouest. Les positions initialement belliqueuses du président Patrice Talon à l’égard du CNSP, combinées à une méfiance croissante des nouveaux dirigeants nigériens envers le Bénin, ont engendré un climat de tension palpable susceptible de dégénérer en conflit ouvert.

Analyse de la Crise

Depuis le coup d’État au Niger, le CNSP a accédé au pouvoir, suscitant des réactions variées dans la région. Patrice Talon, réputé pour son franc-parler et sa fermeté, a adopté une posture résolument opposée aux nouvelles autorités nigériennes. Cette opposition a été perçue comme une menace par le CNSP, alimentant une méfiance réciproque. Le climat de suspicion et d’hostilité ainsi créé favorise des confrontations potentielles.

La décision mal calculée de briser temporairement le contrat de transport des hydrocarbures nigérien et insuffisamment soutenue par ses partenaires, prise par le chef de l’État béninois, a permis aux Nigériens de gagner en influence communicationnelle et en capacité de persuasion, au détriment du Bénin, tant à l’intérieur qu’au niveau régional et sous-régional.

Richard Boni Ouorou, Politologue, président du mouvement libéral

Risques Économiques et Sociaux

Les conséquences économiques d’un éventuel conflit seraient désastreuses pour les deux nations. Le Bénin et le Niger, bien que relativement modestes économiquement, sont intrinsèquement liés par des échanges commerciaux vitaux. Une rupture de ces relations pourrait entraîner des pénuries de biens, une hausse des prix et une détérioration des conditions de vie des populations. Ce phénomène, déjà perceptible à petite échelle, pourrait rapidement devenir le terreau d’un soulèvement interne et d’un désastre social. Comme l’a souligné un politologue, les populations se soulèvent lorsque la contrepartie de la violation de leurs droits – notamment la sécurité alimentaire et la stabilité économique – est compromise. Nous atteignons malheureusement ce point de rupture.

De plus, la montée des tensions pourrait exacerber les divisions ethniques et religieuses, ou créer des alliances religieuses au sein de notre société en soutien au CNSP, posant ainsi un risque accru de conflits internes et de déplacements massifs de populations. Les progrès en matière de gouvernance et de développement au Bénin et au Niger pourraient être gravement entravés par une déstabilisation accrue.

Forces et Faiblesses des Débats Politiques

Les débats politiques actuels sont marqués par une polarisation extrême et une rhétorique enflammée. D’une part, la fermeté désormais « révisée » de Patrice Talon peut être perçue comme une défense de la démocratie et une opposition aux coups d’État. D’autre part, cette approche manque de finesse diplomatique et a conduit à l’isolement régional du Bénin. Patrice Talon aurait-il été sacrifié par ses pairs ?

Du côté nigérien, le CNSP cherche à consolider son pouvoir par des mesures souvent autoritaires, percevant toute opposition externe comme une menace existentielle. Cette posture défensive complique tout dialogue constructif.

Propositions de Solutions

Pour éviter une escalade du conflit, plusieurs mesures pourraient être envisagées :

1. Dialogue Diplomatique Sincère: Un dialogue diplomatique franc et sincère est essentiel. Cependant, la réputation de Patrice Talon, décrit comme un homme sans parole en politique par plusieurs, perception suffisamment distillée dans l’opinion par son prédécesseur au moment de leur conflit , complique cette approche.

2. Médiation Régionale et Décentralisée: Encourager une médiation régionale sous l’égide d’organisations décentralisées telles que des ONG ou des personnalités du monde politique ou religieux. La Communauté Économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), affaiblie par la crise nigérienne, manque de crédibilité pour mener de telles initiatives.

3. Mesures de Confiance: Mettre en place des mesures de confiance, telles que des échanges de délégations et des projets communs, pour réduire la méfiance et favoriser la coopération.

4. Engagement International: Solliciter l’appui des acteurs internationaux, notamment l’Union Africaine et la Russie, déjà proche du Niger, pour soutenir les efforts de médiation et de normalisation des relations.

5. Promotion de la Société Civile: Impliquer les organisations de la société civile des deux pays pour promouvoir la paix et la compréhension mutuelle à travers des initiatives de dialogue intercommunautaire et des activités permanentes et continues.

La crise entre le benin et le Niger constitue une épée de Damoclès suspendue au-dessus de l’Afrique de l’Ouest. Une approche diplomatique prudente, combinée à des initiatives de renforcement de la confiance, est essentielle pour désamorcer les tensions et prévenir un conflit aux conséquences catastrophiques pour la région.

Le conflit entre notre pays et le Niger est un défi complexe qui nécessite une réponse multiforme et coordonnée. Les efforts de médiation, les initiatives de renforcement de la confiance et l’engagement international doivent être soutenus par des réformes internes visant à promouvoir la démocratie et la bonne gouvernance, la confiance dans les institutions, la responsabilité et la respectabilité des gouvernants, le respect de la parole donnée, le respect des engagements envers les populations et un climat apaisé et solidaire. 

Seule une approche holistique pourra désamorcer les tensions et prévenir un conflit dévastateur pour la région.

Prenez soin de vous, 

Richard Boni Ouorou 

Politologue, président du mouvement libéral 

Benin.

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La nécessaire humilité  du pouvoir. (Par Charles Migan, Chroniqueur, Analyste politique)

S’il ne s’agissait de la pérennité  de l’État et de l’intérêt  supérieur  de la Nation, nous dirions: «Encore un peu, et toute vanité  passera».

Mais nous aimons ce pays et nous lui devons assistance filiale; c’est pourquoi nous  nous mêlons de ce qui nous regarde; et ce qui se passe actuellement dans la relation crisogène entre le Bénin et le Niger nous concerne et nous préoccupe.

Charles Migan, Chroniqueur, Analyste politique

Maintenant que le Président  Patrice TALON  est monté  lui-même  au front pour donner la raison pour laquelle son gouvernement « bloque » le pétrole  nigérien dû aux tankers chinois, et qu’en réplique, le chef du gouvernement  nigérien, Ali Mahaman Lamine ZEINE dit pourquoi son gouvernement campe sur la défensive, moi je dis que nous sommes arrivés là où l’égo des hommes doit être déposé à terre.

C’est à ce moment précis où la sagesse millénaire de nos peuples enseigne  qu’il faut s’asseoir pour discuter.

L’heure n’est plus à l’exhibition de pectoraux pour chercher à impressionner; ou brandir ses allonges  pour menacer.

Même  à l’entame des discussions, il ne sera pas nécessaire  le rappel du coup d’état  militaire qui a déposé le Président  Mohamed BAZOUM; comme on ne reviendra pas sur les décisions va-t-en guerre de la CEDEAO  pour vouloir s’imposer au Niger. 

Chacun sait ce qui est de la part de considérations personnelles qui s’entremêlent. 

Ici, nous y sommes pour remettre la prépondérance des pays sur les gouvernances ponctuelles. 

C’est parceque les pays existent qu’ils peuvent être  confiés, pour un temps, à des hommes  et des femmes de les diriger.

Après  la « toute puissance » des hommes, le pays subsistera.

C’est maintenant  que les émissaires,  les vrais, doivent être de sortie. 

Je n’ai pas de légitimité pour conseiller le Niger; mais j’ai le droit légitime d’héritier  de recommander pour le Bénin. 

Si j’étais conseil du Président Patrice TALON, je lui suggèrerais de solliciter l’intermédiation  d’émissaires  crédibles. 

Je lui recommanderais de prendre du recul dans le bras fer avec le Niger. 

Je lui demanderais surtout de  souffrir, sans pouvoir rien faire ( il connaît  la chanson), qu’il ne peut être lui-même,  un interlocuteur  de confiance dans ce dossier avec les autorités  nigériennes. 

Ce n’est pas lui, qui considère  que le pardon est un péché,  qui l’exigerait de son adversaire.  Ce serait contre-productif. 

En fin, je lui préconiserais de garder à distance les courtisans fayots; de se méfier comme de la peste, des louangeurs et autres griots alimentaires. 

J’ai entendu un certain député, Aké NATONDÉ pour ne pas le citer, se moussant sur la sortie du Président Patrice  TALON  dans le conflit nigérien! Que la nature nous préserve  des soutiens qui nous lestent de charges lourdes.

Et de la veine de ce député, il y a pléthore autour.

Celui que les circonstances  ont investi de la mission de porter les intérêts du pays, doit garder à l’esprit, qu’il est un serviteur; mais pas le pays.

A bon entendeur, je souhaite la sagesse de l’humilité.

Charles Migan 

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QUELLE HONTE ? 

(Par Candide A M AZANNAÏ.

Ancien Ministre Porte Parole du Gouvernement, 

Ancien Ministre Délégué en Charge de la Défense Nationale)

«Nous aurions souvent honte de tels actes de tels gouvernants qui rusent à nous les présenter comme nobles, patriotiques si le monde voyait tous les motifs qui les produisent». 

J’avoue que la phrase exacte est de François de La Rochefoucauld. 

J’avoue avoir plagié ce méticuleux écrivain qui a pris assez de soin pour nous avertir des diversions de l’apparence. 

Candide A M AZANNAÏ, Ancien Ministre Porte Parole du Gouvernement, Ancien Ministre Délégué en Charge de la Défense Nationale

Je vous avais indiqué un curieux paradoxe de MONTESQUIEU qui s’était achevé par la phrase : «  Chacun, à la Chine, a dû être attentif à ce qui lui était utile ; si le fripon a veillé à ses intérêts, celui qui est dupe devait penser aux siens. À Lacédémone, il était permis de voler ; à la Chine, il est permis de tromper. De l’Esprit des Lois, Chapitre XX, Livre dix-neuvième, 1748. 

Ce verdict, celui de ce jour est politiquement honteux, diplomatiquement minable et historiquement déplorable. 

Je laisse sa valeur morale publique, son éthique, sa technicité et sa portée juridique sur la conscience qui en est productrice au propre comme au figuré. 

Pour ma part, la République du NIGER et la République du BÉNIN, leurs  peuples et leurs populations victimes innocentes n’en avaient aucunement besoin. 

Je réitère tout mon soutien et toute ma solidarité au Peuple frère du NIGER. 

Quant aux frères nigériens directement concernés par ce triste  épisode, ils ne sont à mes yeux  que des victimes innocentes, de malheureux otages. 

Je vous dis force, courage et fierté. 

Candide A M AZANNAÏ.

Ancien Ministre Porte Parole du Gouvernement, 

Ancien Ministre Délégué en Charge de la Défense Nationale.

En support, j’offre en nouvelles publications deux extraits vidéos datant du 11 Août 2023 pour réitérer notre position et nos préconisations suite aux Coup d’Etat du 26 juillet 2023 au NIGER.

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